En
la fête de la Toussaint, L’Église catholique
honore ceux et celles qui ont particulièrement imprégné
de sainteté son histoire et l’histoire du monde.
Ce faisant, nous évoquons le plus souvent les grandes figures
de la spiritualité au cours des siècles. Nous pensons
moins aux témoins de l’Évangile au cœur
des problèmes de société et des drames de
l’histoire. Nous connaissons bien sûr les grands témoins
de la charité : de saint Laurent à saint Vincent
de Paul et à Mère Teresa. Mais, depuis la fin du
dix-neuvième siècle, se sont levés aussi,
en Europe, des « chrétiens sociaux » qui ont
fait progresser l’action et la doctrine sociale de l’Église,
authentifiées par des encycliques pontificales, pour le
bien commun de notre société.
Récemment, le Pape Jean-Paul II a voulu leur rendre hommage
dans un message adressé à la Semaine sociale, qui
a eu lieu à Lille du 23 au 26 septembre, en attirant l’attention
sur ceux et celles qui ont construit l’Europe (thème
de ce colloque) : « Le centenaire des Semaines sociales
est une occasion pour redécouvrir la longue tradition du
Magistère social de l’Église et les nombreux
saints qui, dès les premiers siècles, ont marqué
le continent européen, tels Benoît, Cyrille et Méthode,
Boniface, Thomas More, les Martyrs des Pontons de Rochefort, Édith
Stein, Maximilien Kolbe ; tous ont montré que l’Évangile
et les valeurs chrétiennes sont un terreau pour la vie
des personnes et des peuples, mais aussi pour l’édification
d’une société. (…) Les soixante années
qui viennent de s’écouler ont été marquées
par de nombreux gestes de réconciliation et par le désir
de faire du continent une Europe de frères ; ce désir
a été avant tout porté par des hommes d’État
chrétiens dont les noms sont présents à toutes
les mémoires, comme par exemple Robert Schuman, Konrad
Adenauer et Alcide de Gasperi ».
Cette tradition d’un christianisme en prise directe avec
la société se poursuit.
À Lille, la Semaine sociale a réuni 4.500 personnes
cherchant à porter un regard neuf sur les réalités
sociales d’aujourd’hui à la lumière
de l’Évangile et sur le christianisme : chance pour
« l’Europe, une société à inventer
».
Dans son message, le Saint-Père poursuivait : «
L’Évangile et l’enseignement social de l’Église
proposent aujourd’hui pour le continent européen
une orientation nouvelle. S’ils ne disent pas comment faire
concrètement, car cela relève de la liberté
et de la responsabilité des peuples et des Autorités
qui les gouvernent, ils indiquent cependant les fondements indispensables
à la construction sociale, pour que soient toujours respectés
les personnes et les peuples et que soient promues la liberté
et la dignité de tout être. »
Ces paroles nous interpellent, nous catholiques des Alpes-de-Haute-Provence.
Connaissons-nous suffisamment l’enseignement social de notre
Église ? Comment témoignons-nous des valeurs évangéliques
dans les problèmes qui sont localement les nôtres
avec nos concitoyens ? Par exemple vis-à-vis de l’avenir
de l’usine de Saint-Auban ou du Centre nucléaire
de Cadarache, vis-à-vis de l’évolution de
notre agriculture ou des questions du tourisme ou de l’environnement,
de l’éducation ou de la culture, de la santé
ou de l’aménagement du territoire, de la précarité,
etc. Comment nous entraider au discernement selon l’Évangile
dans la complexité de ces problèmes ? Comment être
« saints » dans la vie concrète et commune
qui est la nôtre et dans nos engagements civiques, socio-professionnels,
associatifs ? Dans notre diocèse, la JAC a formé
plusieurs générations de responsables. Q’en
est-il aujourd’hui ?
Depuis trois ans existe une « antenne sociale » où,
dans la réflexion concertée entre une dizaine de
personnes et des experts, les questions de notre société
sont analysées pour un discernement chrétien commun.
Mais comment pourrions-nous nous y exercer dans nos secteurs pastoraux
ou nos archiprêtrés ? Comment encourager, entendre,
rejoindre les mouvements qui courageusement s’y attellent
(Secours catholique, CCFD, MCC, ACGF, ACI, MCR…) ?
Ce serait répondre à l’appel de la sainteté
dans notre vie quotidienne et solidaire. Nous sommes appelés
en effet à être des « saints » d’un
christianisme au cœur de notre société, à
l’exemple de ceux et celles qui nous ont précédés
saintement dans notre histoire.