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‘‘N’aie
pas peur, laisse toi regarder
et
aimer par le Christ !’’
« Quand
un chrétien se remettait en pensée devant son Dieu,
il savait qu’il n’avait cessé d’être
regardé et aimé».
Cette
réflexion de l’historien incroyant, Paul Veyne,
dans son récent ouvrage, « Quand notre monde
est devenu chrétien. (312-394) », m’habite
depuis le début du Carême. Et si ce temps
de 40 jours était ce temps de grâce, ce temps favorable,
qui nous était offert pour nous remettre de cœur
et de pensée devant notre Dieu pour reprendre conscience
combien il nous regarde et ne cesse de nous aimer ? Non
seulement en reprendre conscience mais accueillir ce regard et
cet amour qui nous façonnent, nous recréent un
cœur d’enfant, capable d’aimer à son
exemple et à sa ressemblance. Voilà la perfection,
voilà la sainteté.
Au
cœur du Carême retentit cet appel de Jésus, « vous
autres, soyez parfaits comme votre Père des cieux est
parfait » (Mt 5, 48). La perfection n’est
pas une option réservée à quelques âmes
d’élite mais l’appel contenu dans
notre baptême, quel que soit notre état
de vie, comme le rappelle le Concile Vatican II. La perfection à laquelle
nous sommes appelés est celle de l’amour. Cette
perfection ne s’acquiert pas à la force de nos poignets
spirituels. Elle se reçoit. Elle se puise
dans la prière où j’accueille cet amour inconditionnel
dont je suis aimé, dans la pratique des sacrements où je
reçois la force et l’amour qui viennent de Dieu.
La
perfection demande du temps, et elle exige, aussi, que nous ne
nous rêvions pas autre que ce que nous sommes. C’est
tel que je suis, avec mes zones de lumières et
d’ombres que je suis aimé. Dieu
ne m’idéalise pas, car l’idéal n’existe
pas. Il me regarde et il m’aime tel que je suis ;
c’est avec l’être imparfait, mais réel
que je suis, que Dieu collabore et non pas celui qu’il
rêverait que je sois. C’est pourquoi la perfection
passe par un authentique amour de soi. «Tu aimeras ton
prochain comme toi-même »,
nous est-il demandé. Le juste amour de soi est la condition
pour aimer les autres tels qu’ils sont et non pas tels
que je les voudrais. L’amour de soi n’est pas de
l’orgueil ou de l’amour propre mais il consiste à prendre
le parti de Dieu vis-à-vis de moi-même. Je ne devrais
pas m’aimer d’un amour différent que celui
que Dieu me porte. Un amour réaliste, patient. Cet amour
il prend sa source en Dieu qui ne cesse de m’insuffler
un amour personnel, unique, profond, réaliste. S’aimer
soi-même consiste à reconnaître que l’être
que je suis a été voulu par Dieu, que je suis aimé et
choisi par Lui. Ce réalisme est le meilleur moyen de parvenir à la
perfection de l’amour à laquelle il m’appelle.
C’est cet être que je suis que le Seigneur appelle
et conduit à la perfection.
Que
ce Carême soit ce temps où comme Dieu je m’accueille
moi-même tel que je suis, que je me présente à Dieu
tel que je suis, sûr(e) que c’est ainsi qu’il
me regarde et m’aime, que je puisse croire que cet amour
est capable de me façonner un cœur semblable au
sien, un cœur aimant. Alors je serai parfait de cette perfection
qui n’est pas de moi, mais qui vient de lui, la perfection
de l’amour que je contemple, que je reçois et que
j’incarne dans le quotidien de ma vie telle qu’elle
est. Bon Carême à l’écoute et à l’accueil
de l’Amour qui me façonne à son image et à sa
ressemblance.
Christophe
Disdier-Chave.
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