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« Il y a cinquante ans, le 19 mars 1962, un cessez-le-feu bilatéral marquait la fin de la guerre d’Algérie et, le 5 juillet, l’Algérie devenait indépendante. Ces dates restent gravées dans la mémoire de ceux qui ont dû quitter leur terre natale, rapatriés et harkis, laissant derrière eux leur passé et abandonnant pour la plupart leur maison et leurs biens. Que de souffrances endurées, augmentées par toutes les difficultés à se réinsérer ou à s’insérer en France tant au niveau humain que professionnel. Les stigmates restent profondément inscrits au plus profond des mémoires.
De 1954 à 1962, ces huit années ont ensanglanté la terre d’Algérie : assassinats, règlements de comptes, tortures, soldats morts au combat de part et d’autre. Combien de familles meurtries dans leur chair par la mort d’un ou de plusieurs proches : leur souvenir continue à habiter la mémoire de ceux qui ont survécu de part et d’autre ! La blessure demeure vive dans le cœur de nombreux exilés, même si ils ont su montrer leur capacité à se réadapter. Ils n’en demeurent pas moins très sensibles à l’évocation d’un passé finalement encore proche. Outre l’abandon de leur pays, les dépouilles des disparus laissés dans les cimetières d’Algérie, les souvenirs des moments cruels encore bien présents dans les mémoires, il y a eu aussi le drame des milliers de personnes qui ont été enlevées entre février et août 1962 et qui n’ont jamais été retrouvées. En 2012, ceux qu’on appelle encore les « pieds-noirs » vont donc revivre ces événements. (…)Le 5 juillet 1962, ce qui devait être une journée de réconciliation se transforme en une chasse aux Européens et aux Harkis (…).
Face à cette masse de souffrance, ma première réaction est celle de la prière pour que se cicatrisent toutes les plaies laissées béantes et que le pardon de Dieu puisse être donné aux et uns et aux autres. Ici (en Provence), nous avons accueilli de nombreux rapatriés et harkis et la physionomie de nos départements en a été marquée. En cette année (du souvenir) nous nous devons de vivre une authentique réconciliation. Nous devons tous lutter contre toute forme de racisme, incompatible avec l’Evangile ».
Ainsi s’exprimait, dans son bulletin diocésain de mars, l’archevêque d’Avignon, Mgr Cattenoz, qui dit avoir vécu personnellement en Algérie plus de dix ans après l’indépendance et être entré en contact avec de nombreuses familles qui avaient connu l’horreur de la guerre. Moi-même, j’étais militaire appelé en Algérie en l’année 1962. J’ai vécu un temps avec des harkis désemparés et j’ai conduit au bateau vers la France de nombreuses familles « pieds-noirs » qui partaient avec leur valise…, ne sachant pas alors que les uns et les autres ne seraient pas forcément bien accueillis en métropole. Je ne peux oublier ce temps-là, avec les si nombreux jeunes appelés qui ont été plongés dans cette guerre et qui en sont revenus traumatisés…
Puisse cet anniversaire, avec les années qui passent, favoriser la réconciliation des personnes et celle des peuples !
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