Au cours de la célébration de l'ordination
épiscopale, la préface eucharistique présente
ainsi la mission des évêques : « Ils offrent
au nom du Christ l'unique sacrifice de la Croix à la table
du banquet pascal ; ils ont à se dévouer au service
du peuple de Dieu pour le nourrir de la Parole et le faire vivre
des sacrements ; ils seront de vrais témoins de la foi et
de la charité, prêts à donner leur vie pour
la gloire de Dieu et le salut du monde, en se conformant au Christ
».
Pour signifier concrètement cette mission,
chaque évêque a une croix pectorale, qu'il porte sur
la poitrine et aussi dans le cœur et dans sa vie donnée
en
« s'engageant à remplir sa charge jusqu'à la
mort » (rituel d'ordination), à la suite du Christ
qui a aimé les siens jusqu'à mourir sur la Croix.
Cette croix-ci, que je porte habituellement, symbolise
le Mystère pascal du Christ : son Sacrifice dans la mort
pour la multitude et sa Résurrection qui ouvre à tous
la porte de la Vie.
L'artiste (M. Xavier Rémon-Beauvais, de la
région de Tours) l'a appelée « la croix aux
quatre évangiles ». En effet les branches de la croix
représentent quatre pages d'Évangile : celles où
chacun des quatre évangélistes a décrit la
Passion et la Mort de Jésus. Les quatre clous, qui rappellent
ceux qui ont fixé le Christ sur la Croix, assemblent ces
témoignages singuliers et concordants qui nous disent jusqu'où
est allé l'Amour de Dieu pour nous. Ces récits évangéliques
ont été transmis dans le monde entier par la voix
des douze Apôtres et de leurs successeurs, traversant l'épaisseur
de la croix des hommes de tous les temps.
Mais ni l'artiste ni moi-même n'avions d'emblée
esquissé de signification sur le vide situé au cœur
de la croix entre les pages des évangiles et les clous de
la Passion. J'avais cherché pourtant, sans être satisfait.
Les jeunes et les enfants aiment cette croix épiscopale :
j'en ai été souvent le témoin. Ils sont frappés
et me questionnent sur le sens de cette croix.

la croix pectorale
Un jour, dans une rencontre de catéchèse
à Saint-Auban, j'ai demandé aux enfants quelle signification
on pourrait trouver à ce trou dans la croix. Pour certains,
c'était
« la porte du paradis »; pour d'autres, « le cœur
ouvert de Jésus sur la Croix ». Excellentes images
! Mais voilà qu'une fille d'une dizaine d'années (dont
je ne me rappelle malheureusement plus le nom) a eu cette exclamation
:
« C'est la porte du tombeau vide de Jésus ressuscité
».
J'ai gardé précieusement cette réflexion
spirituelle sortant de la bouche d'un enfant animé par l'Esprit
de son baptême. L'enfant venait d'unir le sens manifeste de
la Croix avec le sens caché de la Résurrection. Elle
venait de symboliser (c'est-à-dire : mettre ensemble) et
de mettre en lumière la totalité du Mystère
pascal de Notre Seigneur Jésus-Christ.
Mon souhait d'évêque c'est « que
Dieu nous accorde de garder sans cesse la Pâque de son Fils
présente dans toute notre vie » (prière au terme
du Temps pascal). Des signes comme cette croix-tombeau vide peuvent
nous y aider. Mais l'important est d'inscrire ce Mystère
d'Amour dans l'épaisseur de chaque instant de nos existences
humaines et d'en témoigner.
+ François-Xavier Loizeau, évêque
de Digne
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