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Homélie
Le
25 janvier 1998, j’étais ordonné évêque
et votre évêque. C’était un dimanche,
Jour du Seigneur ressuscité. C’était en la
fête de la conversion de Saint Paul. Ce jour là, à l’appel
de l’Eglise, j’ai dit : « Oui, j’accepte
cette charge au service du Peuple de Dieu et je m’engage à la
remplir jusqu’à ma mort avec la grâce de l’Esprit-Saint ».
Et nous voici dix années après cet évènement,
qui a bouleversé ma vie et sans doute… celle de
notre Eglise diocésaine. La grâce de l’Esprit-Saint
ne m’a pas manqué. C’est moi qui ai pu manquer
au service du Peuple de Dieu ! Que Dieu et vous me pardonniez !
Que Dieu me donne la force de remplir le ministère apostolique
pour vous « jusqu’à ma mort » !
Et je compte sur votre prière et votre appui !
Aujourd’hui,
nous célébrons la fête des Saints Timothée,
qui fut évêque d’Ephèse, et Tite, qui
fut le premier évêque de la
Crète. Tous deux
furent les disciples immédiats de Saint Paul, ses « véritables
enfants » comme il les appelle. Au début de
sa Lettre à Tite, Paul définit parfaitement la
mission de l’évêque : « Serviteur
de Dieu, Apôtre de Jésus-Christ, chargé de
conduire ceux que Dieu a choisis vers la foi et la connaissance
de la vérité dans une religion vécue ».
C’est une foi qui ne se paie de mots ! C’est
la foi qui doit habiter les évêques dans leur mission, à la
manière des Apôtres.
L’Evangile
de la fête raconte la mission des premiers disciples, que
Jésus envoie « dans toutes les villes et localités
où lui-même devait aller ». Une mission
de première annonce de la
Bonne Nouvelle en
quelque sorte, « au milieu des loups », à la
merci de l’accueil ou du refus ! Ne serait-ce pas
toujours le même contexte de la mission des évêques,
hier et aujourd’hui ?
Après
dix années d’épiscopat, je reconnais, dans
la foi de Paul, Tite et Timothée, la même foi qui
m’a été transmise et qui a animé mes
paroles et les actions d’évangélisation que
j’ai entreprises avec vous: que Dieu m’y garde,
avec son Esprit de force ! Qu’Il m’aide toujours à « manifester
sa Parole dans le message qui m’a été confié par
ordre de Dieu notre Sauveur » et à vous garder
dans « la grâce et la paix qui vient de Dieu
le Père et du Christ Jésus notre Sauveur » !
Le
jour de mon ordination, un petit garçon du catéchisme
de Peipin m’a dit, avec un bel accent : « Même
si nous nous disons que ça ne doit pas être facile
d’être évêque du jour au lendemain,
nous savons déjà que nous pouvons compter sur vous
pour nous guider vers Dieu ». Le contexte de la mission
n’est certes pas facile : indifférence religieuse
grandissante, réticences à l’engagement chrétien,
trop petit nombre des ouvriers pour la moisson… Mais j’avoue
que je ne me suis jamais senti très agressé. Il
y a eu et il y a beaucoup de tracas, certes, mais peu de coups
reçus ! Que l’Esprit de douceur me garde dans
la sérénité, dans la
Paix qui vient de Lui,
aujourd’hui et demain comme hier !
Je
dirais même que je me suis senti et me sens toujours heureux
parmi vous et dans ce département si beau qui m’est
devenu très cher.
Je
suis heureux avec vous, mes frères prêtres et diacres,
mes premiers et très chers collaborateurs. Je suis heureux
avec vous, mes frères et sœurs consacrés,
richesse de prière et de présence à tous.
Je suis heureux avec vous, mes frères laïcs engagés
dans le service de l’Eglise ou du monde. Je suis heureux
avec vous, Eglise catholique de Digne, avec qui nous avons vécu
les années jubilaires, les années de visites pastorales
de proximité et maintenant la démarche ensemble « Pour
un nouvel élan missionnaire ». Je suis confiant
avec vous, frères des autres Eglises chrétiennes,
en cherchant ensemble l’Unité.
Je
suis en lien avec vous les représentants de l’Etat
et les élus politiques (je pressens vos espoirs et vos
angoisses à l’approche des élections), vous
qui avez tant fait, en particulier pour l’entretien et
la restauration de notre patrimoine religieux (j’ai dû bénir
en dix ans quelques 80 restaurations de cathédrales, d’églises
ou de chapelles) et je vous remercie aujourd’hui de votre
présence. Je partage vos joies et vos difficultés
vous, tous les acteurs de la vie sociale et industrieuse, vous
les artisans et les artistes, vous les travailleurs et les sans-travail,
vous malades ou en bonne santé, stressés ou décontractés,
touristes ou curistes, surtout vous les pauvres, ceux et celles
qui passez au Foyer Benoît-Labre ou à La
Meyronnette, vous tous
hommes et femmes qui tracez des Chemins d’espoir…
Quant à moi : être
habituellement heureux, c’est peut-être le fond de
mon tempérament, que je tiens sans doute de ma vie heureuse
en famille (et je suis bouleversé de la venue surprise
de quatre de mes cinq frères et sœurs ces jours-ci;
deux frères et leurs épouses sont présents à cette
célébration !). Mais je suis heureux, par-dessus
tout, parce que, comme ma présentatrice vendéenne
le disait le jour de mon ordination, « C’est à Jésus
qu’il a dit oui, en choisissant de Lui donner toute sa
vie pour Le servir et servir ses frères, pour servir et
aimer le peuple qui lui est donné et auquel il se donne
joyeusement »… J’ajoute aujourd’hui cette
précision : vous servir et aimer jusqu’à ma
retraite, si Dieu me prête vie et le Pape cette mission !
Mais, de toutes façons, pour vous « jusqu’à la
mort ». Je l’ai promis au Dieu fidèle,
parce que, depuis mon ordination, vous êtes imprégnés
sur ma tête, en alliance à ma main, gravés
dans mon cœur et parce que je désire tant que tous
et toutes, vous ayez la
Vie et la
Vie divine en abondance » (c’est
ma devise épiscopale tirée de l’Evangile
selon Saint Jean) !
L’autre
jour, alors que je me demandais ce que j’allais vous transmettre
de mieux en un tel jour d’anniversaire (pendant lequel
je reste confondu par tant de délicatesses de votre part),
l’autre jour donc, je suis tombé, dans mon Livre
de prières, sur une action de grâces de Jean de
Damas, moine et prêtre dans le Désert de Juda au
VIII° siècle. Malgré son ancienneté,
cette prière me convient tout à fait car elle fait
allusion à tous ceux et celles qui m’ont donné de
vivre heureux. J’y reconnais mon histoire sainte. C’est
ma prière d’action de grâces devant vous aujourd’hui,
appuyé sur le Christ, mon bâton de pasteur.
Prière
de Saint Jean de Damas
« C’est
Toi, Seigneur, qui m’as fait naître de mon père,
qui m’as formé dans le sein de ma mère ;
c’est toi qui m’as fait venir à la lumière
comme un petit enfant tout nu (…).
C’est
Toi qui as préparé, par le baptême dans l’Esprit
Saint, ma création et mon existence, non par la volonté de
l’homme ou le désir de la chair, mais par ta grâce
indicible (…).
C’est
Toi qui m’as nourri du lait spirituel, c’est-à-dire
du lait de tes paroles divines. C’est toi qui m’as
fortifié par un aliment solide : le Corps de Jésus
Christ notre Dieu, ton Fils unique, le Très Saint, et
tu m’as enivré à la coupe divine, c’est-à-dire à la
coupe de son Sang qui fait vivre, et qu’il a répandu
pour le salut du monde entier.
Tu
nous as aimés, Seigneur, et tu as donné ton Fils à notre
place pour notre rachat qu’il a entrepris volontairement
et sans résistance (…).
Ainsi, ô Christ,
mon Dieu, tu t’es abaissé pour me porter sur tes épaules,
moi brebis égarée, et tu m’as placé dans
un pâturage verdoyant. Tu m’as désaltéré aux
sources de la vraie doctrine par l’intermédiaire
de tes pasteurs dont tu étais toi-même le berger
(…).
Et
maintenant, Seigneur, tu m’as appelé, par l’intermédiaire
de ton grand prêtre, au service de tes disciples. Par quel
dessein de ta Providence, je l’ignore. Toi seul le sais.
Mais,
Seigneur, allège le lourd fardeau de mes péchés
qui t’ont gravement offensé. Purifie mon esprit
et mon cœur. Conduis-moi par le droit chemin, comme une
lampe qui m’éclaire.
Donne-moi
de dire hardiment ta Parole. Que la langue de feu de ton Esprit
me donne une langue parfaitement libre et me rende toujours attentif à ta
présence.
Sois
mon berger, Seigneur, et sois avec moi le berger de tes brebis,
pour que mon cœur ne me fasse pas dévier. Que ton
Esprit bon me dirige sur le droit chemin pour que mes actions
s’accomplissent selon ta volonté, et cela jusqu’au
bout !
Et
toi, très noble assemblée de l’Eglise, en
qui réside la pureté de la foi parfaite, toi qui
comptes sur le secours de Dieu et en qui Dieu trouve son repos,
reçois de moi un enseignement de la foi préservé de
toute erreur. C’est lui, tel qu’il nous a été transmis
par nos Pères, qui fera la force de l’Eglise ! ».
C’est
pourquoi, j’invite ceux et celles qui partagent la foi
de l’Eglise à proclamer avec moi : « Je
crois en Dieu… »
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