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Ø catéchèse et œuvres d’art
Le point de départ de cette nouvelle expérience « catéchèse et œuvres d’art » a eu lieu à la suite d’une relecture de fin d’année avec les catéchistes et les prêtres de l’archiprêtré de Sisteron. Nous nous étions donné deux heures. Les catéchistes ont eu envie de prolonger ce temps, sur une journée entière. Où ? Si nous nous retrouvions dans un beau lieu, autour d’un grand tableau ! Et nous voilà réunis, seuls, dans ce beau lieu de Ganagobie autour d’une descente de Croix, dans la chapelle du Saint-Sacrement. Pour préparer cette journée, le SDC s’était entouré de deux artistes peintres et de frère Philippe, architecte spécialisé dans les monuments historiques pour faire cette toute nouvelle expérience, aidés de la pédagogie mise à notre disposition par le Service National. Emerveillement de tous. Partage profond. Élargissement du regard intérieur de chacun par les découvertes des autres. Parcours biblique au travers de cette œuvre, l’échelle, par exemple, nous faisant faire le lien avec des textes de l’Ancien Testament : échelle de Jacob … La journée avec les catéchistes a été un temps très fort, conduisant à l’expression personnelle et à la prière.
Depuis trois ans, nous avons donc décidé de travailler ce domaine. Les évêques de France, au même moment, nous engageaient sur ce chemin (TNOC §3.7) : éveiller à la dimension artistique, « la beauté et l’art étant une médiation particulièrement riche et prometteuse ». Mais déjà Jean-Paul II en 1999 disait « pour transmettre le message que le Christ lui a confié, l'Église a besoin de l'art. Elle doit en effet rendre perceptible et même, autant que possible, fascinant le monde de l'esprit, de l'invisible, de Dieu. Elle doit donc traduire en formules significatives ce qui, en soi, est ineffable. Or, l'art a une capacité qui lui est tout à fait propre de saisir l'un ou l'autre aspect du message et de le traduire en couleurs, en formes ou en sons qui renforcent l'intuition de celui qui regarde ou qui écoute ». Et Benoît XVI, le 17 octobre 2008 renchérit en faisant valoir « la nécessité de savoir lire et scruter la beauté des œuvres d'art ».
La méthode que nous mettons en œuvre :
- 1er temps : Regarder en silence. Se laisser rejoindre, inonder par le beau, toucher, émouvoir. Alors que nos mots sont tout petits pour dire la grandeur de Dieu, la poésie, la peinture, la musique arrivent à exprimer plus que ce que nous pouvons formuler. Nous sommes transportés au-delà de nos réalités quotidiennes, hors du temps.
- 2ème temps : dire chacun où son regard s’est posé. Lâcher prise. Non ce que j’ai envie d’expliquer mais ce qui m’a happé au premier regard. Quelque chose m’est donné, qui n’est pas la même chose pour tous. Entendre le partage de chacun m’ouvre le regard et le cœur.
- 3ème temps : Réagir à ce qui a été exprimé. Pouvoir dire « je » en nous interrogeant chacun. Le TNOC invite les catéchètes à « permettre l’éclosion d’un homme qui accepte de vivre pleinement de naître à lui-même, à son identité singulière et incomparable ». Le partage nous fait percevoir des interprétations différentes. Nous nous corrigeons les uns les autres, nous nous faisons grandir les uns par les autres, nous enrichissons notre culture biblique. Quels textes de la Parole nous viennent à l’esprit ? Nous pouvons relire les textes devant l’œuvre pour vérifier notre interprétation…
- 4ème temps : laisser reposer nos paroles, revisiter personnellement cette œuvre qui nous a ouverts à la contemplation et au dialogue avec Dieu. Chant méditatif, lecture de l’un des textes de la Parole évoqués, action de grâce.
De cette expérience, naissent deux journées de formation « catéchèse et œuvres d’art », d’une grande richesse. Ateliers divers, décryptage de scènes de vitraux, recherche d’une pédagogie adaptée aux enfants. Se présenter, en deux minutes, en expliquant pourquoi nous avons choisi, parmi deux cents autres, telle œuvre d’art peut dire énormément de la vie de chacun.
Une iconographe, accepte de nous guider (gratuitement !) trois jours pour découvrir les mosaïques de Ravenne. Nous voilà partis à 25 et Mgr Loizeau avec une condition : ne pas d’abord apprendre des choses sur… mais commencer par nous laisser saisir par l’œuvre, partager autour d’elles sur ce qu’elles évoquent de la Bible, pour arriver à un enseignement. La prière est montée de nos cœurs devant ces tableaux et ce partage, l’Eucharistie a pu être célébrée, chaque jour, sur les lieux. Après Ravenne, nous avons pu prolonger cette recherche, avec cette guide, par Arles et St-Gilles du Gard, le musée Chagall à Nice et Notre-Dame du Bourg. En septembre ce sera autour d’œuvres d’Arcabas et de fresques du XIIème à l’abbaye de St-Chef (Isère). Le but est de pouvoir animer un temps catéchétique autour d’œuvres d’art, pour ceux qui s’y sentent prêts. Plusieurs l’ont déjà fait depuis, cela a fait l’objet d’un atelier passionnant, aux dires de participants, à Ecclésia 04, sur les pèlerins d’Emmaüs.
D’autres grands moments ont été vécus, par les artistes eux-mêmes parfois ! Souvenons-nous du témoignage de Jacky peignant la scène de la pêche des disciples : « Jésus, tu m’as sauvé, je vais te mettre ! ». Dans la chapelle St Claude, lors de la randonnée-catéchèse au Vieux Noyers s/ Jabron, enfants et adultes ensemble. Lors d’une rencontre MCR à Manosque. Avec des familles un peu éloignées de l’Eglise, à Ganagobie, où chacun présentait aux autres ce qui l’a particulièrement touché dans cette église, là aussi adultes et enfants mélangés. Lors d’une séance de catéchisme, autour d’un retable présentant la Cène, avec quelques unes des réactions de ces enfants : « C’est un peu drôle / C’est quand Jésus dit « buvez ce vin c’est mon sang, mangez ce pain, c’est mon corps ». Ben moi, j’le ferais pas ! / Les gens, ils ont existé ou pas ? C’est joli, on dirait qu’il y a du pain, du fromage. On dirait qu’ils sont dans la maison de Dieu. Moi, je crois que c’est le dernier repas de Jésus avec ses amis / Normalement, c’était pas dans une église qu’il l’a fait ! / ? On dirait que la nappe c’est un drap / On dirait qu’ils sont tristes / C’est normal, parce que c’est le dernier repas avec Jésus / Mais, pourquoi ils ont tous du rouge ?/ Ils ont bu trop de vin !! / On dirait qu’il y a de la joie sur le dessin / Moi, je dirais de la tristesse / Jésus, on voit qu’il y a quelque chose qui le contrarie, c’est le seul qui a la bouche comme ça (dessinant un arc de cercle vers le bas, sur ses lèvres) / Ils sont 6. Il a invité qu’eux ?/ La place libre c’est la place du pauvre / Mais les femmes elles n’ont pas le droit ?.. » ... Merveille, ces enfants qui pressentent le lien entre le linceul du tombeau vide et l’Eucharistie, la réalité du pain et du vin, la passage de la tristesse à la joie, anticipation mort/résurrection…
Le vendredi Saint, une étape de plus a été franchie, en associant à la lecture d’image proposée par Timothée Radcliffe son témoignage greffé sur sa méditation théologique des sept dernières paroles du Christ en Croix avec la musique de Joseph Haydn. Il nous faut creuser cette complémentarité musique/peinture et pourquoi pas d’autres formes d’art ?
Dans une présentation du livre « le ver était dans le fruit, un christianisme en dégénérescence », de Marie-Abdon Sabtaber (Cerf), Laurent Villemin évoque un équilibre à retrouver, sous peine de mort en citant Santaner « Croire implique la participation de l’être humain dans son entier… Croire est également le fait de l’affectivité dont l’accord avec l’intelligence et la volonté s’exprime à travers les arts et la compassion ». (La Croix, 23 avril 2009, p. 13).
Le Service Diocésain de la Catéchèse est à votre disposition pour animer une formation, une journée ou vous donner des outils pour mettre en place une telle expérience dans votre secteur paroissial, le service ou le mouvement dans lequel vous êtes engagé.
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A suivre
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