Bien chers
tous,
Voici maintenant trois mois que nous sommes arrivées
au Costa Rica, et nous avions promis de donner des nouvelles.
Grâce à Dieu, tout va bien, et toutes vont
bien.
Comment vous partager, sans écrire un livre, notre
vécu et nos découvertes durant ce temps ?
Après quelques semaines d’adaptation, notre
vie s’organise jour après jour.
Notre arrivée, le 19 avril, fut un peu mouvementée.
À peine étions-nous sorties de l’aéroport
qu’une panne d’électricité, comme
cela n’arrive jamais, a mis tout le pays dans la plus
totale obscurité ! Notre évêque nous
a accueillies à la lueur d’une chandelle, et
nous avons fait connaissance de la maison avec des lampes
électriques. Cela n’a pas empêché
les jeunes postulantes de la congrégation franciscaine
dans laquelle sont religieuses deux sœurs de sœur
Anne-Marie, de nous faire une aubade, avec guitare et chants
du pays, premier témoignage de l’accueil chaleureux
qui nous a été réservé.

Depuis, nous en avons des signes chaque jour.
Nous avons appris par hasard que Monseigneur avait fait
lire dans toutes les paroisses une lettre annonçant
l’arrivée de sœurs contemplatives françaises,
« grâce pour le diocèse et pour le pays
» (sic) et demandait à ses diocésains
que nous ne manquions de rien. Résultat : les gens
viennent faire connaissance avec les « sœurs
de clôture » comme ils disent, qui avec un sac
de provisions, qui avec des intentions de prières,
qui avec des ustensiles, de cuisine ou autres, bien appréciés
au début, car notre déménagement a
mis deux mois à nous parvenir : le container parti
de Peyruis le 1er avril est arrivé à Alajuela
le 6 juin... un mois en mer, un mois dans les locaux de
la douane du Costa Rica. Grâce à Dieu, les
objets précieux, comme le tableau de sainte Jeanne
offert par le diocèse de Digne au moment de notre
départ, sont arrivés intacts.
Les six premières semaines, sans chapelle
et sans aumônier, nous avons dû aller à
la messe tous les soirs à l’église paroissiale
qui se trouve juste derrière notre maison. Ne pas
avoir la présence réelle dans la maison pendant
tout ce temps nous a été bien sensible, mais
cela nous a valu de découvrir les gens du quartier,
la paroisse et les manières d’être et
de célébrer. Maintenant, le curé de
la cathédrale s’est organisé avec plusieurs
prêtres de la ville et ils nous assurent la messe
quotidienne très volontiers et avec beaucoup de plaisir
semble-t-il. Lui-même est très content de pouvoir
la célébrer une fois par semaine en français
en souvenir des trois années qu’il a passées
à la faculté catholique de Paris il y a vingt
ans.

Nous pouvons compter déjà sur
de nombreux voisins et amis. Quelques uns participent chaque
jour à la messe et à l’office, que nous
chantons en espagnol, avec beaucoup de répétitions,
vous le devinez ! Le chant de l’office n’est
pas dans les habitudes, et ce n’est que petit à
petit que certains le découvrent. La messe par contre,
est très suivie, y compris en semaine.
La foi est encore bien vivante au Costa Rica,
même si la sécularisation montre son nez. Deux
petits exemples : pour la fête du Saint Sacrement,
chaque paroisse fait une procession dans les rues autour
de l’église, avec décorations et reposoirs,
comme chez nous autrefois. Lorsque la procession de l’église
proche de chez nous est passée devant le stade qui
est en face de la maison, les joueurs de football se sont
arrêtés de jouer, et se sont tournés
vers le dais sous lequel Jésus était exposé...
Notre Dame des Anges (fêtée le 2 août)
est Patronne du Costa Rica et sa basilique voit venir à
cette occasion deux millions de pèlerins –
pour quatre millions d’habitants que compte le Costa
Rica. Le Président de la République, prix
Nobel de la Paix en 1986, y est présent avec une
partie du gouvernement... Ce n’est pas religiosité,
mais actes de foi vécue sans complexes.
Les églises sont pleines pour les
nombreuses messes du dimanche (il est habituel que chaque
prêtre dise sept ou huit messes dans le week-end !),
et bien animées par des équipes de laïcs,
adultes ou jeunes, nombreux, qui se sont formés pour
cela (ministres de la Parole, ministres de l’Eucharistie,
etc.. ) Les Costariciens attendent beaucoup de la vie contemplative
qu’ils ne connaissent pas, puissions-nous ne pas les
décevoir !

Petit à petit notre vie communautaire
prend forme. La maison qui nous est prêtée
par les pères Rédemptoristes, inoccupée
depuis plusieurs années, nécessitait des travaux
qui se terminent seulement. Il semble que les fuites des
plafonds soient enfin colmatées, ce qui va nous permettre
de terminer l’aménagement d’une grande
salle polyvalente : bibliothèque, lingerie, liturgie
et salle de communauté.
La chapelle quant à elle a été
aménagée dès l’arrivée
du container dans une ancienne salle de classe, en dehors
de la clôture, proche de l’entrée de
la maison, ce qui facilite l’accès des personnes
qui y viennent.
À l’intérieur, un patio (petit jardin
intérieur de trois mètres sur quinze) entouré
d’un grand couloir couvert sur lequel donnent toutes
les pièces de la maison, fait office de cloître.
Celle-ci est située en pleine ville
d’Alajuela (deux cents mille habitants). Comme les
autres, la ville est construite à la manière
américaine, quadrillée tous les cent mètres
et construite tout en rez-de-chaussée, car les volcans
sont proches. Cela nous change beaucoup du Bartèu,
d’autant que nous n’avons qu’un tout petit
jardin en bordure de la route, sur lequel donnent les fenêtres
de la chapelle. La route est très passagère
et bruyante. Pendant l’oraison du matin, nous entendons
les ébats joyeux des enfants qui partent à
l’école primaire proche de chez nous où
les cours commencent à 7 heures.
Le climat est tout à fait supportable.
Il fait très bon le matin quand le jour se lève
et que la vie s’éveille, à 5 heures.
La chaleur monte avec le soleil, jusqu’à la
pluie généralement en début d’après-midi
; après il fait meilleur. La température varie
entre 18 et 28°, voire 30. Quand on arrive de Haute-Provence,
on ne trouve pas que ce soit excessif ! Le soleil est couché
à 6 heures du soir tous les jours de l’année.
Pour le travail lucratif, nous nous sommes
d’abord consacrées à la carterie, car
il semble que le style français plaise, différend
de ce que l’on rencontre ici ordinairement. Plusieurs
librairies se sont proposées de nous les vendre.
Il est encore trop tôt pour savoir si cela prendra
des proportions.
Depuis peu nous avons commencé les
confitures avec les fruits qui nous sont donnés,
ananas, bananes, mangues, coco, cela a l’air de bien
plaire, et pour nous c’est l’occasion de nombreuses
visites à notre petit magasin. Une amie qui a une
boutique de lingerie, vend aussi nos cartes et confitures,
et les fait connaître.
Nous sommes beaucoup aidées aussi
par la famille de sœur Anne-Marie, spécialement
sa sœur religieuse, et une cousine qui est là
tous les matins pour s’enquérir de nos besoins
: achats, démarches administratives, elle nous a
été très utile.
Il y aurait tant de choses à raconter
encore ! mais vous partagerez déjà ces quelques
échos. Quant à nous, nous poursuivons notre
chemin, essayant d’enraciner notre vie d’Annonciades
au cœur de ce pays qui nous est déjà
cher, dans le silence et la vie fraternelle, demandant la
grâce d’une fidélité vivante,
généreuse et joyeuse. Nous comptons toujours
sur votre prière à cette intention ? Merci
! Nous avons emporté avec nous tous vos visages,
et portons dans notre prière l’histoire et
les intentions de chacun
Les sœurs Annonciades
de Peyruis au Costa Rica
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