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Saint-Michel l'Observatoire s'est établi près de
la voie domitienne, la route qui reliait l'Espagne à l'Italie
par les Alpes (le col de Larche) ; elle passait par Arles, Apt,
Céreste, Lurs et Sisteron. Elle a d'ailleurs été
utilisée aussi par les Piémontais pour se rendre à
Compostelle !
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Le village de
Saint-Michel l'Observatoire |
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Cette grande voie de communication a ouvert le pays à l'arrivée
du christianisme, vers le quatrième siècle.
Les grandes abbayes : Saint-Victor de Marseille, Villeneuve-les-Avignon,
Montmajour ont rapidement essaimé le long de la voie et créé
des prieurés, que l'on voit apparaître à partir
du huitième siècle, à Carluc, dans la plaine
de Reillanne, à Ardène, à Saint-Paul, Saint-Sauveur,
Salagon : on retrouve des vestiges de ïeurs églises,
une poterie grise abondante, à décors de palmettes
et de rouelles, et des tombes en sarcophages. Une curieuse stèle
chrétienne, qui se dresse encore au sommet d'un éperon,
face à Saint-Jean, du côté du levant, remonte
à cette époque. Il peut en être de même
des agglomérations en pierre sèche que l'on retrouve
sur les Craux d'Ardène.
C'est seulement avec le neuvième siècle que les documents
écrits et surtout les documents archéologiques vont
abonder. Les prieurés se multiplient sur tout le territoire.
Autour du puits des moines, de leur moulin, de leur four, de leur
chapelle et de leur école, les populations vont se rassembler,
et ce sera l'origine des villages de Lincel, de Saint-Paul-Champelas,
de Saint-Michel, de Porchères, de Châteauneuf, de Mane...
Il s'y presse une population laborieuse, pauvre, qui se laisse parfois
manœuvrer par des éléments sortis de son sein
et qui se qualifient assez vite du titre de seigneurs.
Les moines apportent à la population, avec une foi et une
culture, des moyens de vivre et un art de bâtir. Les établissements
agricoles prospèrent, les maisons sont de plus en plus solides
et belles, les églises et les ponts, appareillés en
grands moellons de molasse, seront si bien construits qu’ils
arriveront jusqu'à nous, parfois sans la moindre lézarde.
Le douzième siècle représente l'apogée
de cet art et de cette culture ; jamais plus, par la suite, la communauté
locale ne se retrouvera aussi unie, aussi constructrice.
« Ce n'est point tout de décrire l'anatomie de ces
monuments ; nous risquerions, à nous en tenir à ces
seules descriptions architecturales, pour utiles qu'elles soient.
à la compréhension d'un édifice, de manquer
l'essentiel qui est leur caractère sacré.
Ces prieurés ruraux, ces églises de villages ont été
élevés en plein douzième siècle par
les communautés locales sous la direction d'architectes et
de maîtres d'œuvre qui, s'ils n'étaient pas ces
moines de Saint-André, étaient des laïcs en quête
de Dieu Leur intelligence, leurs mains, leurs talents, leur savoir
étaient au service de Dieu, qu'ils essayaient d'approcher
par cet humble contact quotidien avec la pierre noble qu'ils transformaient
pour glorifier le Tout-Puissant Maître du monde. L’architecture
romane de nos terroirs humanisés est pour cela parfaite,
car. œuvre vivante d'hommes intelligents ^ et de surcroît.
des siècles de prières lui ont donne une âme.
»
Guy Barruol, in Saint-Michel l'Observatoire, éditions
des Alpes de Lumière
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